LA PIERRE, L’INDICE SÉCULAIRE
La pierre, ses diverses utilisations et les indices laissés par les hommes permettent aux archéologues de dater l’occupation du Haut-Vallespir dès la préhistoire.
Les vestiges de la vie passée, disséminés sur tout le territoire, couvrent une période qui débute au néolithique, comme en témoigne par exemple la Jasse dels Porcs, un chaos de rochers de différentes dimensions à Arles Sur Tech ayant certainement servi d’habitations. Les constructions mégalithiques découvertes à Saint Marsal, Taulis, Corsavy et à Prats de Mollo, entre autres, confirment également l’occupation du territoire durant la préhistoire. Les mas ou les chapelles qui parsèment les hautes vallées attestent de la fuite des populations pendant les invasions barbares et leur établissement dans des zones moins accessibles, comme ce fut le cas à Sant Guillem.
Les forges localisées près des cours d’eau et les vestiges liés à l’exploitation du charbon dans les hautes vallées sont les témoins de l’évolution de l’industrie du fer à partir du XIIIe siècle. Des bergeries, dont certaines présentent un intérêt patrimonial remarquable, et des orris, d’anciens abris d’estive, sont également visibles au cours de randonnées. Lieux d’habitats séculaires, des grottes ont abrité les Trabucaires, des bandits de grands chemins établis en Vallespir vers 1840 et arrêtés au Mas de l’Aloy, à Corsavy, par les gendarmes et les douaniers d’Arles Sur Tech. Autour de Sant Guillem, des barrages et de nombreux systèmes de soutènement, majoritairement en pierre, parsèment le territoire. Ces ouvrages de génie civil témoignent de la volonté étatique, dès 1856, de restaurer et conserver les terrains en montagne.
Jusqu’à la moitié du XXe siècle, la densité de population dans les hautes vallées est importante. À cette époque, on dénombre à proximité du Mas de Sant Guillem 5 autres lieux d’habitation : Cal Picoutous, le Grell, les Aplegadors, la Pina et les Perrotes. Les habitants de Cal Picoutous sont partis avant 1940 mais la majorité de la population a quitté le territoire entre 1944 et 1954. À ce moment-là, la famille Planes, domiciliée aux Aplegadors, comptait alors 8 enfants : 6 garçons et 2 filles. L’actuel refuge était la bergerie du Mas de Sant Guillem, situé en amont. Le dernier résident du mas s’appelait Pep. Originaire du Mas de Perrafeu, situé près de La Preste, il avait effectué seul son déménagement du Mas de Perrafeu jusqu’à Sant Guillem, soit près de 12 kilomètres à vol d’oiseau, laissant sa famille dans la basse vallée. Véritable force de la nature, Pep avait transporté sur son dos, en plusieurs aller-retour, tout ce dont il avait besoin. Il en avait fait de même pour l’énorme chaudière en fonte nécessaire à la préparation de la charcuterie, ce qui lui prévalu le surnom de Tarzan.
La majorité de ces bâtiments pâtit des dégâts du temps depuis le départ des habitants. Actuellement, une partie de Cal Picoutous, louée par le Cercle des Jeunes de Perpignan, est encore en bon état. Certains membres de cette association d’excursionnistes sont à l’origine de la première descente de la flamme du Canigó dans la plaine. Le Mas de Sant Guillem, occupé pendant les périodes d’estive par le berger Pierre du Riu (à Prats de Mollo), s’est également bien conservé. Avant sa réhabilitation, l’ancienne bergerie, devenue aujourd’hui le Refuge de Sant Guillem, avait aussi résisté au temps. Une partie était louée à un privé. L’autre avait été aménagée en refuge et restaurée dans les années 2000 par l’Office National des Forêts, afin que les randonneurs y trouvent un minimum de confort.